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Chapitre IV. La Cour pénale internationale

Pour comprendre la Cour pénale internationale, il faut parler un petit peu de son origine, comment on en est arrivé à faire qu'une cour qui traite des questions pénales existe au plan international.

Section 1. Origine

Cela peut paraître un non-sens qu'existe au plan international une Cour pénale, puisque le problème principal des juridictions internationales, c'est le problème de la coercition, c'est-à-dire faire en sorte que l'État respecte sa sanction, parce qu'il n'y a pas de police super étatique qui puisse venir forcer, contraindre un État à respecter sa condamnation.

Or, le droit pénal, c'est le droit de la coercition : s'il n'y a pas de coercition, il n'y a pas de droit pénal parce que le droit pénal, c'est celui qui prononce des condamnations et si ces condamnations ne sont pas respectées, il est inutile en réalité d'avoir du droit pénal.

Donc, une Cour pénale internationale sans coercition, sans pouvoir de coercition, finalement, on n'en voyait pas pendant très longtemps l'utilité parce qu'encore une fois, il n'y a pas de policiers internationaux, il n'y a pas de prison internationale dans laquelle on pourrait enfermer les criminels internationaux. Et donc, l'idée d'une juridiction pénale internationale paraissait être en non-sens.

Ça a été la position et l'idée qui a longtemps prévalu sur la scène internationale, sauf qu'il y a eu la Seconde Guerre mondiale, avec évidemment les exactions qu'on connaît du régime nazi et les atrocités qui ont été commises pendant la Seconde Guerre mondiale.

Et au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la communauté internationale, c'est-à-dire tous les États, le concert des nations, a fait évoluer la manière de voir les choses, et on s'est dit que ce n'était pas possible de laisser ces actes impunis et qu'il fallait créer une juridiction internationale pour les punir.

Cette juridiction internationale, c'est le tribunal de Nuremberg, qui est un tribunal ad hoc, qui a été créé spécialement pour juger des crimes de guerre qui ont été commis pendant la Seconde Guerre mondiale, qui ont été commis par les nazis.

Ce tribunal de Nuremberg avait donc une mission qui était tout à fait ponctuelle. Il s'agissait de juger uniquement des crimes de guerre nazis. Et une fois que le tribunal de Nuremberg a rempli sa mission, qu'ils ont jugé les criminels nazis, le tribunal de Nuremberg a été dissous.

On a créé une juridiction pénale internationale mais juste pour un sujet précis, les crimes de guerre nazis. Et une fois que le tribunal a rempli sa mission, il n'existait plus. Mais le tribunal de Nuremberg est là le premier exemple de juridiction pénale internationale.

Après le tribunal de Nuremberg, on a créé deux autres tribunaux ad hoc pour deux situations différentes.

  • Il y a eu le tribunal pénal pour le Rwanda. Il y a eu une guerre civile au Rwanda qui a opposé deux ethnies qui peuplent le Rwanda. Et des crimes de guerre ont été perpétrés pendant cette guerre. On a établi un tribunal compétent pour juger uniquement les crimes de guerre commis au Rwanda.
  • De la même manière, l'ex-Yougoslavie a connu aussi une guerre civile qui, là aussi, a opposé plusieurs ethnies, plusieurs peuples. Et là aussi, des crimes de guerre ont été commis. On a donc créé, à la suite de la guerre, un tribunal pour l'ex-Yougoslavie qui ne traitait que des crimes de guerre pour l'ex-Yougoslavie.

Donc, le tribunal pénal pour le Rwanda et le tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie ont fait leur oeuvre. Ils ont jugé des crimes qui les concernaient et puis ils ont été dissous, pareillement, une fois qu'ils ont fini leur mission.

Donc, les premières cours pénales internationales, c'était ces tribunaux Nuremberg, Rwanda, ex-Yougoslavie mais qui n'avaient pas de vocation permanente.

Après ces trois premiers essais, s'est imposé l'idée au sein des Nations Unies que l'on pourrait finalement recourir à une cour pénale internationale qui, elle, aurait une vocation permanente et qui serait donc chargée de juger des crimes de guerre mais de façon permanente.

C'est au cours des mois de juin et juillet 1998, c'est relativement récent, que la majorité des Etats membres des Nations Unies ont voté pour la création de la Cour pénale internationale.

Alors, 120 Etats se sont prononcés en faveur de la création de la cour, 7 Etats s'y sont opposés, au nombre desquels des Etats importants et notamment les Etats-Unis, la Chine et Israël.

Mais à la règle de la majorité, évidemment, la Cour pénale internationale a été finalement créée.

Section 2. Compétence

La compétence de la Cour est de juger des crimes en matière pénale les plus graves et de juger non pas des Etats mais des personnes. Et c'est là une différence majeure avec les autres juridictions internationales que nous avons étudiées jusqu'à présent, qui, elles, jugeaient des Etats.

Juger les crimes les plus graves

La compétence de la Cour pénale internationale consiste à juger des crimes les plus graves et on vise par là trois catégories de crimes.

  • Les crimes de guerre, donc les exactions qui sont commises pendant une guerre mais qui n'ont pas une vocation militaire.
  • Les crimes contre l'humanité.
  • Les génocides.

Ce sont ces trois infractions seulement qui peuvent être portées devant la Cour pénale internationale. Mais ensuite, la Cour pénale internationale a une compétence personnelle, elle ne juge que des individus et pas des Etats.

Juger des individus (et pas des États)

C'est là une différence fondamentale entre la Cour pénale internationale et les autres juridictions internationales, en tout cas celles vues précédemment.

Les cours internationales vues jusqu'à maintenant, jugent des Etats. Ici, il ne s'agit pas de juger un Etat, mais de juger des individus qui ont commis les fameux crimes de guerre, génocides ou crimes contre l'humanité.

On ne juge pas des Etats, parce qu'on ne pourrait pas sanctionner d'un Etat qui aurait commis un crime contre l'humanité, par exemple le dissoudre.

Donc, la seule solution, c'est de se contenter de condamner, de juger les personnes, soit qui ont permis de procéder à ces crimes, soit ceux qui les ont perpétrés. Et donc, le plus souvent, les justiciables de la Cour pénale internationale, sont les dirigeants qui ont autorisé, qui ont organisé le crime contre l'humanité, le génocide ou les crimes de guerre.

Attention, dans certains cas, alors même qu'on est face à un crime de guerre, un crime contre l'humanité ou un génocide, la cour pénale internationale ne sera pas saisie, parce que la Cour pénale internationale n'a qu'une compétence subsidiaire, c'est-à-dire qu'un Etat peut décider de juger lui-même de ses dirigeants qui auraient commis les atrocités décrites.

Un exemple concerne l'Irak. Au moment de la chute de Saddam Hussein, il avait été question éventuellement de juger Saddam Hussein devant la Cour pénale internationale, sauf que les Irakiens ont décidé de juger eux-mêmes leur ex-dirigeant, ils ont procédé à un procès, ils ont condamné à mort Saddam Hussein et ils l'ont exécuté sans recourir à la Cour pénale internationale.

Donc, la compétence de la cour pénale internationale est subsidiaire, c'est-à-dire qu'elle sera compétente uniquement si l'État qui a subi les infractions ne décide pas lui-même de procéder au jugement des personnes incriminées.

Section 3. Fonctionnement

Composition

Il n'y a que 18 juges à la Cour pénale internationale. Ces juges sont élus par les États partis à la convention. Evidemment, seuls les États qui ont signé la convention sur la Cour pénale internationale peuvent avoir un siège qui juge.

Les États-Unis, la Chine et Israël n'ont pas souhaité signer la convention sur la Cour pénale internationale, ils ne peuvent donc pas avoir de juge. Même s'ils sont membres de l'ONU, ils ne peuvent pas avoir de juge pour la Cour pénale internationale.

Sanction

Concernant les sanctions, on en revient toujours au problème lié à l'absence de police internationale ou de prison internationale. Mais en fait, cette question est résolue de manière assez simple, on compte finalement sur la coopération internationale.

L'idée, c'est que finalement, l'exécution de la sanction va reposer sur la coopération internationale, c'est-à-dire la coopération entre les tribunaux et l'exécutif des pays signataires de la convention sur la Cour pénale internationale et la Cour pénale internationale elle-même.

Il y a donc une coopération entre les services de police et les services de l'exécutif de chaque pays membre qui ont accepté la compétence de la cour avec la cour pénale internationale.

L'idée, c'est que la Cour pénale internationale va émettre, une fois que les personnes sont condamnées, ce qu'on appelle un mandat d'arrêt international et chaque état qui a signé la convention sur ces pays va devoir, si les personnes condamnées se trouvent sur son territoire, les arrêter et les emprisonner.

Donc c'est là où se trouve la personne, qu'elle est arrêtée au nom de la coopération internationale et emprisonnée au nom de la coopération internationale.

Voilà comment ça fonctionne pour mettre en oeuvre les décisions et les condamnations de la cour pénale internationale.